Un zeste d’amour (Remarques sur)
Auteur: COHEN Jessie
Un zeste d’amour (Remarques sur)
Un zeste d’amour (Remarques sur)
1 – La limite différentielle1
Jessie Cohen
« Sacré nom d’un Dieu, dit-il en se tournant vers ses amis et leur montrant son vit collé contre son ventre, me voilà dans un état où j’entreprendrais furieusement de choses. – Et quoi ? lui dit le duc, qui aimait à lui faire dire des horreurs quand il était dans cet état-là. – Quoi ? répondit Curval : telle infamie que l’on voudra me proposer, dût-elle démembrer la nature et disloquer l’univers. »
Sade, Les 120 journées de Sodome ou L’École du libertinage.
« Démembrer la nature et disloquer l’univers », comment mieux rassembler en ces deux propositions indépendantes le programme de ces 120 journées de Sodome, où l’on ne compte plus les étrons avalés, les corps fouettés, les membres rompus, les organes crevés ou arrachés, les parties de corps brûlées, comptabilité relevée par la contrainte extrême qu’introduit la description détaillée du supplice d’Augustine, comme une déformation ductile2 dans le matériau de ce récit archi-structuré :
(Extrait) «…Cela fait, on lui découvre les os et on les lui scie en différents endroits. Puis l’on découvre ses nerfs en quatre endroits formant la croix, on attache à un tourniquet chaque bout de ces nerfs, et on tourne, ce qui lui allonge ces parties délicates et la fait souffrir des douleurs inouïes. On lui donne du relâche pour la mieux faire souffrir, puis on reprend l’opération, et, à cette fois, on lui égratigne les nerfs avec un canif, à mesure qu’on les allonge. Cela fait… »
Pourquoi reprendre ce supplice insoutenable – dont ce fragment n’est qu’un échantillon – si ce n’est qu’il présentifie à lui seul la « jouissance sans libido » à la mode sadienne, soit, selon la thèse de Pierre Bruno3, que « nulle libido ne vienne gâcher une jouissance qui doit être filtrée de tout élément érotique »4 .
Car ce qui est en jeu ici n’est rien moins que l’accès au Souverain Bien, « Das Gute ohme das Wohl »5, qui implique cette « réjection radicale du pathologique » dont parle Lacan dans Kant avec Sade (Écrits). Cette disjonction idéale, ce sera au partenaire d’en supporter l’utopie, soulignant la place réelle du partenaire dans le fantasme du sadique.
Lacan écrira que la victime « a la monotonie de la relation du sujet au signifiant en quoi (…) elle consiste » (Kant avec Sade), mais ne peut-on supposer quelque variété, non sans lien avec une certaine sorte d’amour, quand bien même la victime se définirait strictement du fait de ne pas être épargnable ? L’amour authentique se signerait-il dans l’acte d’épargner celle ou celui qui, dans la logique sadienne, n’aurait pas dû l’être ? Quid de celle ou celui que l’on qualifie d’aimable sous les traits du ou de la complice du pervers ?
C’est ainsi que se concentra mon interrogation à la relecture de « L’arrangement (sur la perversion) », que nous travaillons actuellement en cartel6. Depuis la découverte de ce texte, j’avais admis l’hypothèse de Pierre Bruno quant à la présence d’un « îlot d’amour » dans Les 120 journées entre Julie et l’évêque (l’un des quatre sadiques du Château de Silling), sans pour autant aller voir de très près. L’opportunité du cartel me permit de cibler ce point pour m’en servir comme boussole lors de ma lecture de ce rouleau-compresseur7 que sont ces 120 journées. Il reparlera de ce même « îlot d’amour » dans Un transfert résolu, première séance du séminaire « Deux, l’amour » tenu avec Marie-Jean Sauret à Toulouse en 2008-2010. Il emploiera à cette occasion l’expression « zeste d’amour » que j’ai repris comme titre de mon écrit. D’amour, entre l’îlot et le zeste, le second eut ma préférence car il permet d’associer le sens figuré d’une petite quantité – un chouïa – à celui d’un arôme suffisamment caractéristique pour en reconnaître la présence indiscutable.
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Mais avant d’entrer dans les dédales des 120 journées de Sodome, il me paraît important de s’attarder sur les conséquences de la thèse de Pierre Bruno « le pervers vise à atteindre une jouissance sans libido », dont je n’extrais ici que quelques traits pour le besoin de mon exposé, à partir de la lecture que j’ai pu en faire.
Il y a d’abord son articulation rigoureuse avec les deux schémas du fantasme sadien de Lacan dans « Kant avec Sade » : dans le premier temps, c’est au partenaire de jouir sans libido, du fait que le pervers ne puisse faire autrement que d’absolutiser la castration (traduite en termes de privation, d’où son désaveu), afin que, dans le deuxième temps, à partir de l’émergence de l’angoisse chez le partenaire, il puisse récupérer le fruit de son travail purement altruiste – où il se faisait pur instrument (« fétiche noir ») – sous la seule forme subjective possible : celle de sa disparition intégrale. Y parvient-il ? Non, puisque l’ablation de l’Éros n’a qu’un seul horizon possible, la mort…mais comme dit le proverbe : « qui ne tente rien n’a rien », d’où cette comparaison du sujet pervers avec un « héros de fiction » qui oscillerait entre deux tentations : le passage à l’acte criminel et la littérature.
Mais cette thèse nous fournit aussi la précieuse boussole qui permet de repérer précisément le lieu où se niche cette jouissance sans libido, à travers le fantasme à l’œuvre dans le récit littéraire ou clinique. Pour mon exposé, je ne retiens ici que deux conséquences (parmi plusieurs autres8) :
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Premièrement, elle nous donne le moyen de tracer de façon très précise la limite différentielle, dans l’articulation liée à la possibilité d’une identification narcissique à la jouissance féminine, entre le libertin9, puisse-t-il être le plus extrême perverti dans ses pratiques de jouissance, et le pervers à strictement parler, qui peut à l’occasion se reconnaître lui-même libertin et le faire reconnaître à d’autres,
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Deuxièmement10, elle nous fournit l’outil permettant de repérer avec précision celui ou celle que l’on désigne comme étant le partenaire du pervers, qui ne se définira strictement que d’être celui ou celle à qui sera dévolue la tâche de jouir sans libido. Ce point me parait primordial pour toute élaboration rigoureuse sur la perversion.
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Pour le premier point, je reprendrai l’ouvrage de André Pieyre de Mandiargues L’anglais décrit dans le château fermé, où Pierre Bruno déniche11 ce que l’on pourrait appeler le paradigme de cette jouissance sans libido, dans une expérience in vivo où le seigneur du château, du nom de Montcul, va prouver à son invité la jouissance de cette femme (« la putain reluit »), à la vue forcée de son enfant que l’on va fendre en deux et écorcher vif.
Persuadé de l’effet garanti, sur son invité, de ce qu’il pensait être le clou de son spectacle12, le maître de cérémonie se tournera vers lui, mais pour constater, à sa grande déception, que ce spectacle le laisse complètement de marbre. L’invité, que Montcul avait qualifié à son arrivée au château d’« homme sérieux »13, c’est-à-dire un libertin ouvert à ses « expériences » et apte à en jouir pleinement14, ne pourra cependant pas dépasser cette limite qui l’aurait fait passer du statut d’invité-libertin à celui de confrère-sadique, comme le sont les quatre compères du Château de Silling15. Car « ce qui s’éprouve, passées certaines limites, n’a rien à faire avec ce dont le désir se supporte dans le fantasme qui justement se constitue de ces limites. », ainsi que l’écrit Lacan dans Kant avec Sade.
« Eros est un dieu noir », dira le seigneur de Gamehuche, citation conclusive du roman à prendre au mot près, c’est-à-dire à mille lieues de la « simple fouterie »…Laissons parler le seigneur de Gamehuche dans un discours en tout point semblable à celui qu’aurait pu tenir le célèbre comte Zaroff du classique « Les chasses du comte Zaroff » (The most dangerous game, 1932), et auprès de qui il aurait trouvé là le parfait confrère :
« Tant d’hommes, là-bas, dont le point d’orgueil est de se prétendre coureurs de filles, chasseurs de femme ; l’idée ne se fera-t-elle jamais place en leur petit crâne que, de toute chasse, l’essentiel est la mise à mort ? Quête, traque, poursuite (ce sont les mots qu’ils emploient), leur jeu ne cesserait d’être factice et frivole que s’il aboutissait non plus à une simple fouterie d’après bal de famille mais au pur déchaînement du chasseur sur sa proie » (p 97).
Le seul vrai libertin digne de ce nom, si tant est qu’on puisse encore l’appeler ainsi, se définirait alors comme celui dont le jeu irait jusqu’à la « destruction physique de la créature qui n’était là que pour nous donner le plaisir de son corps » (p 98)...en n’omettant pas de préciser toutefois que « cette destruction de l’autre n’a de fin que quand le pervers, logiquement [selon les deux temps du fantasme pervers] se détruit lui-même comme autre. ».16
L’on peut supposer que l’auteur Pieyres de Mandiargues était au fait de ce savoir sur le fantasme, si l’on en croit la manière dont, dans son récit, il ne tranchera ni en faveur de l’invité ni de son hôte, laissant place au désir dans son incertitude. Certes, l’invité finira par déguerpir du château sans arme ni bagage, mais « sans porter aucun jugement sur ce que [son] redoutable ami nommait ses expériences » (p 146). Davantage, s’il ira jusqu’à le comparer à « un caquet de toupie irlandaise » (p 109), il dira par ailleurs qu’il est « tout au monde plutôt que ridicule » (p 94). De son côté, Montcul, bien que choqué devant certaines réactions pusillanimes de son invité17, n’ira pas pour autant jusqu’à le ridiculiser. Décalage de position de l’auteur qui, tout en avouant « chérir ce vieux livre assez abominable » lui paraissant digne d’être reconnu (p 19), invitera le lecteur à ne pas « trop prendre au sérieux ce qu’il est en train de lire » (p 12). C’est pourquoi Pierre Bruno parlera à ce sujet de « fiction émancipatrice » permettant au lecteur de ne pas être pris dans la scénarisation perverse, à l’opposé de ce que l’on peut rencontrer chez l’auteur Sade.
En effet, pour Sade, « on est toujours du même côté, le bon ou le mauvais ; aucune injure n’y changera rien » (Kant avec Sade). Lacan l’emploie ici, dans le rapport du désir et de la loi, entre la victime, incarnée par excellence dans la figure de Justine, et son bourreau. Mais l’on pourrait décliner une autre dichotomie, à partir de la conjonction du savoir et de la vérité, entre Dolmancé, « l’homme » définitivement « sérieux » de La philosophie dans le boudoir (dédié « Aux libertins »), et le Chevalier de Mirvel incarnant ici la figure du libertin frisant le ridicule. Il suffit pour s’en convaincre de lire l’argumentation indigente que lui prête l’auteur Sade, à la fin du Cinquième Dialogue, lorsque le Chevalier va tenter, par son discours, d’anéantir les principes de Dolmancé, à propos de la sensibilité dont il ne faudrait pas se départir :
« Laissons là les principes religieux, j’y consens ; mais n’abandonnons pas les vertus que la sensibilité nous inspire (…) je suis jeune, je suis libertin, impie, je suis capable de toute les débauches de l’esprit, mais mon cœur me reste, il est pur, et c’est avec lui, mes amis, que je me console de tous les travers de mon âge ».
Dolmancé n’aura de fait aucune difficulté à démonter son discours, en concluant par ces mots :
« Oui Chevalier, vous êtes jeune, vous le prouvez par vos discours (…) Ah croyez, Eugénie, croyez que les plaisirs qui naissent de l’apathie valent bien ceux que la sensibilité vous donne ».
L’apathie au chef des réjouissances, voici ce qui, dans cet ersatz d’échange, ressortira comme principe absolu, consacrant Dolmancé comme étant celui qui, sans l’ombre d’une incertitude, occupera la place de maître du savoir sur le désir. Il sera soutenu en cela par son (nécessaire) auditoire : Mme de Saint-Ange qui reprochera au Chevalier, son frère, de les sermonner, et Eugénie qui entérinera sans surprise le triomphe de Dolmancé. Il ne restera plus alors au Chevalier qu’à jouer le rôle de faire-valoir de son maître, très loin de la position occupée par l’invité du château de Gamehuche.
Pas moyen chez Sade de sortir du « sérieux », du fait qu’il reste prisonnier de son fantasme – et y enferme son lecteur – ce qui n’est pas incompatible avec le fait qu’il n’en soit pas « dupé »18 (Kant avec Sade)19. Il arrive alors que son discours prenne des accents poignants :
«…ce n’est qu’en sacrifiant tout à la volupté que le malheureux individu connu sous le nom d’homme, et jeté malgré lui sur ce triste univers, peut réussir à semer quelques roses sur les épines de la vie » (Préface de La philosophie dans le boudoir).
Quant à l’humour chez Sade, dont Lacan dira qu’il « en manque tout à fait absolument » (Kant avec Sade), il se révèle parfois dans des répliques qui auraient pu, si elles avaient eu cette intention, virer du côté d’un certain humour pince-sans-rire. Philippe Sollers, dont on pourrait dire qu’il fait figure aujourd’hui de libertin dissident20, dira la nécessité de lire Sade « avec une sorte de rire sous-jacent », lors d’une interview accordée en 201321 suite à la tentative d’interdiction des 120 journées de Sodome en Corée du Sud22. Il lira à cette occasion le supplice d’Augustine (extrait en première page), le qualifiant à la fois de terrible, mais aussi d’humoristique23…
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Toujours à propos de cette limite différentielle au voisinage de cette jouissance sans libido, l’on peut rappeler le développement de Pierre Bruno dans La (dé)mission perverse à partir du célèbre roman de Pauline Réage, Histoire d’O (1954), fer de lance de la littérature libertine, et de sa suite Retour à Roissy (1969). A propos de ce dernier texte, l’auteure écrira : « Les pages que voici sont une suite à l’Histoire d’O. Elles en proposent délibérément la dégradation, et ne pourront jamais y être intégrées »24. Car O, qui s’enorgueillissait d’être la propriété de son amant Sir Stephen dans Histoire d’O, découvrira avec horreur dans Retour à Roissy n’être plus qu’une marchandise « remise à la communauté » par les soins de ce même Sir Stephen, lequel disparaîtra complètement de son paysage – comparablement aux deux temps du fantasme pervers.
Cette suite non intégrable, desérotisée, pourrait se traduire comme l’impossible passage, à moins d’une « dégradation », à une jouissance sans libido. Toutefois – et c’est là le point d’entrée qui réduira O à n’être finalement plus que la partenaire-du-pervers – cette « dégradation » était déjà au fondement de l’histoire, celle de O :
« Songeons cependant que le sujet véritable de l’Histoire d’O est une fanatique ascèse de l’amour, menée très loin sur la personne d’une femme par une méthode de dégradation progressive, volontairement acceptée par le sujet et qui devrait, en bonne logique, aboutir à une dégradation totale de la chair. », Pieyres de Mandiargues (« Roissy-en-France »)25.
D’où la conclusion logique de Pauline Réage « Devant O, il n’y eut plus rien que cette mort vers laquelle obscurément elle courrait de toutes ses forces »26, avec les deux choix possibles qu’elle nous propose finalement (p 203) pour une issue à l’histoire d’O : ou bien O retourne à Roissy où Sir Stephen l’abandonne (chapitre supprimé), ou bien O préfère mourir, se voyant sur le point d’être quittée par Sir Stephen (seconde fin). Aucune autre fin n’est envisagée par l’auteure…et surtout pas celle édulcorée du film Histoire d’O de Just Jaeckin de 1975 (désavoué par Pauline Réage), où l’on voit O et Sir Stephen dans une scène censée symboliser leur profonde complicité, O s’autorisant à inverser les rôles en marquant Sir Stephen d’un rond de brûlure de cigarette identique à la forme de son célèbre anneau, en signe de leur réciproque union.
Cette fin sentimentale à l’excès – mais aussi bien tout autre dénouement de type plus ou moins « happy end » – aurait pu être celle fantasmée par “une” O mais non par l’auteure qui écrira, dans Une fille amoureuse, que ses « étranges rêveries » comme elle les nomme, l’aidaient au contraire à apprivoiser sa vie, « comme si quelque rançon était payée par les délires et les délices de l’impossible »27. Ici, la fiction émancipatrice constituera le biais par lequel l’auteure tirera les conséquences que O n’a pas tirées, comme l’indique Pierre Bruno, « ouvrant l’espace pour elle-même d’une jouissance qui ne se laisse pas « chausser » par la castration. ».28
Pauline Réage était cependant un pseudonyme, celui de Dominique Aury (née Anne Duclos)29, compagne clandestine de Jean Paulhan. Lors d’une interview qu’elle accordera en 1998 (peu avant sa mort) à la cinéaste Pola Rapaport30, elle dira, dans sa langue paternelle, l’effet subjectif radical que fut pour elle la mort de son amant, trente ans auparavant en 1968 :
« I lived with him for fifteen years (…) the last part of my being alive, of my life being alive. After that, I didn’t. I stopped everything. ».
Elle sembla dès lors vivre dans une zone d’entre-deux-morts, où « l’entre-deux-morts de l’en-deçà (…) n’est pas autre que celui dont se soutient l’au-delà. » (Lacan, Kant avec Sade).
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Serge André dans L’imposture perverse avancera que Sade « est celui qui révèle la face refoulée du libertinage, celui qui s’avance là où le libertin le plus convaincu commence lui-même à reculer »31 : tandis que le libertin prônerait la non-obéissance à la loi morale commune, la loi morale chez Sade serait de stricte obéissance à jouir.
Cette stricte obéissance à jouir, commandée d’abord au partenaire-du-pervers, est aux confins de « ce qui ferait signe d’un intérêt pour la libido du partenaire et sa jouissance au sens commun du terme »32, ce dont le libertin se fait le héraut. Et de même, ce que ce dernier pourrait, à l’appui du trait pervers, imaginer de plus indiscutablement pervers, n’aura strictement rien à faire avec la perversion – comme le martelait Lacan tout au long de son séminaire33. Pourquoi ? – là est ce qui fait reculer jusqu’au libertin le plus convaincu – parce que « le névrosé ne peut imaginer qu’une jouissance soit desérotisée » (La (dé)mission perverse).
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notes
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1 Ce sous-titre correspond à une première partie d’un exposé qui en compte trois (dont deux sont à venir).
2 (Rhéologie) Se dit d’une roche soumise à une contrainte qui se déforme mais qui, au-delà d’un certain seuil, ne reprend pas sa forme initiale quand la contrainte cesse.
3 Thèse (fil conducteur de ce texte) développée dans les articles « L’arrangement (sur la perversion) », « La (dé)mission perverse » et « L’acte pervers », rassemblés dans l’ouvrage de Pierre Bruno « Une psychanalyse : du rébus au rebut, éditions érès, 2013. Les deux premiers textes ont été publiés en 2006, respectivement dans les numéros 5 et 6 de la revue Psychanalyse.
4 P. Bruno, Une psychanalyse : du rébus au rebut, p 246.
5 « Un bien sans bien-être », ibid., p 228.
6 Cartel enregistré au Pari de Lacan sous l’intitulé « Le sujet pervers et l’amour, à la lecture des textes de Pierre Bruno in Une psychanalyse : du rébus au rebut », avec Geneviève Gilbert, Mario Uribe Rivera et Sandrine Léon.
7 Référence à la célèbre forme du manuscrit retrouvé dans le cachot de Sade à la Bastille, « rangé dans un étui caché entre deux pierres, et composé de 33 feuillets collés bout à bout, formant un rouleau d’une longueur de 12,10 mètres sur une largeur de 11,3 cm, écrit au recto puis au verso, d’une petite écriture serrée à l’encre brune. ». Le manuscrit, qui devait être vendu aux enchères en décembre 2017 (estimation 4 à 6 M€), suite à la liquidation judiciaire du fonds Aristophil, a été classé trésor national par le ministère de la Culture.
8 Voir à ce sujet la présentation rigoureuse de ses textes par Michel Mesclier en 2007 lors du Midi-Minuit de la psychanalyse de l’APJL (http://www.revuepsychanalyse-yetu.com/lectures/).
9 Libertin à la fois au sens du libre-penseur du XVIIe siècle, dont les représentants, pour ne citer que les plus connus, sont, en amont, Pierre Charron (« De la sagesse »), François de La Mothe Le Vayer (« Dialogue fait à l’imitation des anciens »), Pierre Gassendi (dont « Vie et mœurs d’Epicure »), Gabriel Naudé, Dassoucy, Saint-Evremond…, mais également au sens de liberté de mœurs (à partir du XVIIIe siècle avec Crébillon fils, Choderlos de Laclos…).
10 Ce point n’est pas développée dans le présent texte (il fera l’objet de la seconde partie de mon exposé – cf note 1).
11 P. Bruno, op. cit., p 256.
12 « Je suis sûr que vous bandez, vous qui êtes, à ce qu’il paraît, un homme à queue», L’imaginaire, Gallimard, p 146.
13 « Je vous ai invité parce que j’ai pu me rendre compte, une fois, que vous étiez un homme sérieux ; je suis également un homme sérieux, à mon point de vue. », ibid., p 46.
14 Pour l’illustrer, voici la réaction de l’invité à la vue du spectacle de la petite Michelette jetée dans le bassin aux poulpes : « Alors telle confusion de la chair enfantine avec les mollusques céphalopodes, dans un décor de soie et de dentelles rompues, de sang, d’encre animale, de sable et d’eau salée, parvint à un degré de bestialité grandiose où il y avait peut-être de cela que l’on nomme obscurément sublime, et je fus tout à fait égaré. », ibid., p 68-69.
15 Le duc de Blangis, l’évêque son frère, le président de Curval, et le financier Durcet, tous quatre maîtres d’œuvre des 120 journées de Sodome.
16 P. Bruno, op. cit., p 255.
17 En particulier à travers un petit détail – humoristique – où l’invité évoquera sa peur et son dégoût devant un plat de « cervelles d’oiseaux de mer » piquées sur un bec, alors qu’il reprendra trois fois des « laitances glacées sous priape » et des « béatilles de merde à la parisienne », op.cit., p 52-55.
18 A l’appui de ce qu’en écrit Serge André dans son ouvrage très argumenté, L’imposture perverse : « Non pas que Sade se soit affranchi de son fantasme, mais plutôt qu’il s’y soit consacré, en sachant que c’était un fantasme, et quitte à payer le prix qu’il fallait pour cela. », éditions du Champ Freudien, 1993, p 25.
19 « Apercevons plutôt que Sade n’est pas dupé par son fantasme, dans la mesure où la rigueur de sa pensée passe dans la logique sa vie. », J. Lacan, « Kant avec Sade », Écrits.
20 Qualificatif permettant de dissocier le sens qu’a aujourd’hui le mot de libertin, réduit à sa traduction en termes d’économie de marché.
21 Un amour de Sade (http://www.philippesollers.net/un-amour-de-sade.html).
22 Les 120 Journées de Sodome sont depuis octobre 2012 autorisé à la vente en Corée du Sud, avec la mention publication nocive pour les mineurs, interdit au moins de 19 ans et vendu sous blister. La commission Éthique gouvernementale de publication coréenne, saisie par des associations de mères, finira par se ranger à l’avis de la maison d’édition Dongsuh Press (c’était sa 4ème tentative depuis 1977), concluant que le livre avait été écrit pour « plonger dans le côté sombre de l’âme humaine et non pour simplement provoquer une excitation liée au sexe ou à la violence ».
23 Je partage toutefois son avis concernant la musicalité de l’œuvre de Sade, spécialement dans Les 120 journées de Sodome.
24 Pauline Réage, Histoire d’O suivi de Retour à Roissy, coll. Le Livre de Poche, p 217.
25 Ibid., p 282.
26 « Une fille amoureuse » in Histoire d’O, p 211.
27 « Une fille amoureuse », ibid., p 212.
28 P. Bruno, op. cit., p 259.
29 C’est en 1994, quarante ans après la publication d’Histoire d’O, qu’elle révélera au grand public en être l’auteur.
30Interview intégrée dans le documentaire de Pola Rapaport intitulé The writer of O, Arte, 2004.
31 Serge André, op. cit., p 23.
32 P. Bruno, ibid., p 237.
33 Par exemple dans Le désir et son interprétation, séance du 24 juin 1959 : « Le fantasme pervers n’est pas la perversion. L’erreur la plus grande est de nous imaginer que nous comprenons la perversion, nous tous, tant que nous sommes, c’est-à-dire en tant que nous sommes plus ou moins névrosés sur les bords, pour autant que nous avons accès à ces fantasmes pervers. » (http://staferla.free.fr/S6/S6.htm)